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Reconnaître, Rompre et Renaître : Se Libérer des Relations Toxiques Par Sylvie Le Merrer  

Reconnaître, Rompre et Renaître : Se Libérer des Relations Toxiques Par Sylvie Le Merrer  

Sylvie le merrer

Vous êtes-vous déjà sentie épuisée, dévalorisée ou envahie de doutes après une conversation ? Qu’il s’agisse d’un partenaire, d’un-e ami-e de longue date, d’un membre de votre famille, d’un collègue de travail, certaines relations ont un impact insidieux sur notre bien-être. Vous avez beau essayer d’aller bien, de maintenir vos objectifs, , certains parviennent à semer le doute, à vous faire sentir « moins que », et parfois à travestir votre propre réalité. 

Les relations toxiques ne sont pas faciles à repérer car elles se construisent sur des comportements subtils et progressifs. Apprendre à les identifier et à s’en détacher est essentiel pour préserver votre équilibre et reprendre confiance en vous. Dans cet article, découvrez comment reconnaître ces relations nuisibles, oser vous en libérer, et retrouver force et sérénité. 

Je suis thérapeute et depuis plus de 20 ans j’ai accompagné de nombreuses femmes qui ont ressenti ce malaise dans des relations qui semblaient pourtant saines. Certaines clientes comprennent rapidement qu’elles doivent se libérer, tandis que d’autres mettent du temps à identifier la dynamique pernicieuse. Une chose est certaine: toutes ont en commun un ressenti profond que quelque chose ne va pas, même si elles ne savent pas toujours l’identifier. C’est là qu’un accompagnement est nécessaire pour faire la différence. 

1. Repérer les Signes d’une Relation Toxique

Les signes peuvent être subtils ; des comportements répétitifs et insidieux minent progressivement la confiance et le bien-être, provoquent le doute, une fatigue émotionnelle. 

  • Le contrôle : Une personne toxique peut tenter de diriger vos décisions, vos actions, et même vos émotions. Par exemple, Isabelle* venait me voir après des disputes avec son partenaire. Leur vie intime était inexistante et il justifiait toujours son absence de désir par des remarques sur son physique ou ses tenues : «  tu devrais être plus féminine, j’ai l’impression que tu ne fais plus d’efforts pour me séduire » et si elle faisait des efforts, la critique s’inversait « tu es trop séductrice, ton comportement est trop agressif » Quand elle le remarquait ses incohérences, il  répétait  : « Tu exagères, tu as mal compris. Ça nest pas du tout ce que je tai dit». S’’ensuivaient des discussions sans fin qui parvenaient à la même conclusion : ma cliente était responsable, coupable, gâchait les bons moments. Ce type de remarque remet en question nos propres ressentis. Ma cliente me confiait qu’elle ne comprenait plus rien et ne savait plus quoi penser.  • Le manque de respect : Les remarques dévalorisantes ou critiques déguisées en plaisanteries sont des signes de mépris. Martine me racontait comment son amie, sous couvert d’une a priori « gentillesse » à son égard,  lui assenait des réflexions telles que : « Alors, ce petit projet créatif, cest pas un vrai métier, cest une occupation  ? » Ou encore « Laisse-moi taider sinon tu ne vas jamais y arriver ». Ces critiques constantes finissent par affecter l’estime de soi. Elles passent souvent inaperçues parce qu’elles semblent « bienveillantes ». 

Une autre de mes clientes Marie faisait parfois du shopping avec sa mère, obsédée par le poids, qui lui disait «  Oui c’est très joli mais tu vois si tu perdais encore quelques kilos, ça t’irait tellement mieux. » Si Marie se rebiffait, sa mère lui répondait qu’elle disait cela parce qu’elle l’aimait et voulait son bien. Puis ajoutait  «  Tu es si susceptible, on ne peut rien te dire ! » 

  • La manipulation émotionnelle (gaslighting) : est l’un des comportements les plus subtils et le plus destructeur. En début de relation, le partenaire ou l’ami-e va se déployer pour vous séduire, pour se rendre indispensable. Il-elle va créer le personnage et le scénario parfaits pour vous plaire, répondre à vos attentes, vous piéger. Elizabeth* qui venait de rompre une relation terriblement toxique s’est retrouvée à douter. Elle me raconte qu’elle a rencontré la nouvelle petite-amie de son ex compagnon, et lui demande des nouvelles de la grand-mère de celui-ci. La nouvelle petite-amie s’étonne et répond n’avoir jamais entendu parler d’une grand-mère. Pourtant, pendant sa relation avec ma cliente, son compagnon pervers avait créé un scénario où les liens familiaux étaient primordiaux. Il fallait ainsi régulièrement rendre visite à sa grand-mère. Cette obligation lui permettait d’éloigner Elizabeth, de  l’isoler de sa propre famille, de ses proches, en invoquant un argument imparable : l’importance des liens familiaux qui lui tenaient tant à cœur. Mais pour sa nouvelle petite-amie, il avait créé un scénario tout autre qui lui correspondait à elle, et n’avait plus besoin d’invoquer l’importance de la famille. Plus de grand-mère. 

  • Pour une autre de mes clientes, Alice* , son partenaire lui faisait toujours des compliments en public puis la critiquait violemment en privé. Quand elle le lui faisait remarquer, il disait : « Tu fais toujours des histoires, pourquoi tu réagis comme ça ? » Ce qui la poussait à  se remettre en question, niant ses propres émotions, la rendant vulnérable à la manipulation. Leur entourage les voyait qui plus est comme le couple parfait et lui comme un homme attentionné… 

  • Linstabilité émotionnelle,  fréquente dans une relation toxique. Julie*, une autre de mes clientes me confiait que ses interactions avec sa supérieure hiérarchique étaient marquées par des changements d’humeur abrupts. Un jour, sa patronne était chaleureuse et attentionnée ; le lendemain et sans raison, elle devenait froide et distante. Ce type de comportement crée une atmosphère de confusion et d’anxiété. 

Conseil Pratique : Soyez à l’écoute de vos perceptions. Une relation saine n’est pas censée vous épuiser, vous rendre anxieuse après chaque interaction. Une personne sensible et empathique tombe facilement dans le piège de se remettre en cause, de se dévaloriser ou de culpabiliser. Ce qui  alimente petit à petit l’emprise de l’abuseur-euse. Il est alors primordial de prendre du recul pour avoir une vision plus large de la situation et de commencer à remettre en cause le comportement pervers de l’autre. 

« L’amour véritable ne blesse pas, il élève. Avoir l’espoir d’une relation saine, c’est déjà un acte d’amour envers soi-même : quitte ce qui te détruit pour embrasser ce qui te guérira. »

Sylvie Le Merrer

Pourquoi Sommes-Nous Parfois Sujettes aux Relations Toxiques ? 

Au fil de mes années de pratique, j’ai observé  que des schémas profondément ancrés, souvent liés à des expériences passées ou à des besoins émotionnels non satisfaits dans l’enfance, conduisent mes clientes à des relations toxiques 

Les recherches sur les relations abusives (physiques, émotionnelles, ou verbales) montrent que ces relations suivent un « cycle de la violence ». Selon des études de chercheurs comme Lenore E. Walker dans son livre The Battered Woman(1979), ce cycle se compose de trois phases : 

  • Phase de tension : Les conflits s’intensifient, mais la victime reste dans le déni ou espère que les choses s’amélioreront. 
  • Phase de crise ou d’explosion : L’agression physique ou émotionnelle se produit. 
  • Phase de lune de miel : L’agresseur se montre charmant, regrette son comportement, et la victime peut croire que les choses vont changer, créant un sentiment d’espoir et de dépendance. 

Cela explique pourquoi les victimes de toute forme violences restent dans des relations toxiques pendant longtemps, malgré des souffrances répétées. Les émotions contradictoires créent un attachement traumatique et une dépendance émotionnelle

La codépendance est l’un des mécanismes clés de la relation toxique que j’identifie souvent chez mes clientes.  

C’est une dynamique dans laquelle une personne devient émotionnellement dépendante d’une autre. Cela a été largement étudié dans le cadre des relations abusives et des addictions, comme dans les travaux de Melody Beattie (auteure de Codependent No More). Les codépendants ont souvent des antécédents de relations dysfonctionnelles. Ils acceptent des comportements abusifs en raison de leurs besoins émotionnels non satisfaits. 

Une étude de Kernberg (1975) sur les troubles de la personnalité a montré que les individus codépendants ont des difficultés à établir des frontières saines, ce qui les rend vulnérables aux relations toxiques. Leurs émotions sont régulées par le comportement de l’autre, créant une dynamique où ils ignorent leurs propres besoins pour plaire ou aider l’autre. 

Lorsqu’on manque de confiance en soi ou que l’on a une peur profonde de l’abandon ou du rejet,  on peut se retrouver dans des relations où l’on cherche à sauver ou réparer l’autre, quitte à se sacrifier, à sans cesse donner la priorité aux besoins de l’autre. Le gaslighting est un autre mécanisme très fréquent. Il s’agit d’un phénomène de manipulation où une personne cherche à faire douter l’autre de sa propre perception de la réalité. Étudié dans le domaine de la psychologie sociale et des relations abusives, une publication de la revue Psychology of Violence en 2018 a révélé que les personnes ayant été victimes de gaslighting  éprouvent des sentiments de confusion, de perte de confiance en soi, et parfois des symptômes de trouble de stress post-traumatique (TSPT)

Dans de nombreuses situations, les personnes manipulatrices séduisent d’abord leur cible par une attention excessive, des compliments constants et une sensation de lien profond. Puis, elles commencent à éroder l’estime de soi de leur victime en remettant en question leur perception de la réalité. Dominique*, une autre de mes clientes me disait : « Je n’avais jamais eu autant de doutes sur moi-même avant lui. »  Au début de sa relation, son compagnon ne cessait de vanter  les  qualités de Dominique, en la comparant en permanence avec son ex-femme, en en profitant pour dégrader, rabaisser celle-ci. En expliquant que Dominique était ainsi bien supérieure à son ex-femme, comme s’il y avait une rivalité. Puis, il pouvait au contraire soudain valoriser son ex-femme sur des sujets sensibles comme son rôle de maman, sa réussite professionnelle, afin d’humilier davantage Dominique, toujours dans ce système pervers de comparaison. Il pouvait lui dire « je suis très heureux que tu travailles, je suis fier de tout ce que tu accomplis » puis quelques semaines plus tard si elle abordait son travail, il répondait « je ne vois pas pourquoi tu es fatiguée, on ne peut pas dire que c’est le travail qui t’épuise» Le gaslighting crée une confusion tellement forte qu’il devient difficile de distinguer ce qui est vrai de ce qui ne l’est pas, laissant la personne dépendante de la validation de l’autre. 

Reconnaître ces schémas de codépendance et de manipulation est essentiel.C’est là que mon rôle de thérapeute intervient. À travers des exercices pratiques et un soutien émotionnel, j’aide mes clientes à identifier les relations problématiques, se libérer de ces dynamiques délétères et à retrouver leur autonomie émotionnelle et leur estime d’elle-même. 

2.  Comment S’en Sortir : Oser Briser les Chaînes

Une fois une relation toxique identifiée, il est nécessaire d’agir pour vous protéger. En tant que thérapeute, mon rôle est d’aider mes clientes à établir des stratégies concrètes pour s’en défaire. 

Voici quelques étapes que je recommande : 

  • Se confier à une personne de confiance : Parler est un premier pas vers la libération. se confier, c’est prendre conscience que nous ne sommes pas seules,  qu’il est légitime de solliciter de l’aide, auprès d’une amie, d’un membre de la famille ou d’un professionnel. Parler à un professionnel permet plus facilement de reconnaître une relation dysfonctionnelle. 

  • Poser des limites claires : Apprendre à poser des limites est l’un des aspects les plus puissants du travail que je fais avec mes clientes.  Le compagnon d’une de mes clientes par exemple, Anne* lui imposait de partager tout leur temps libre, qu’il s’agisse du quotidien, des vacances, des week-end, etc.  avec de tierces personnes : famille, amis, collègues de travail. Ils n’avaient jamais de moments partagés en couple. Ceci lui permettait de garder le contrôle, en évitant toute forme d’intimité. Anne a fini par comprendre la situation et a commencé à poser ses limites, notamment en refusant parfois ces moments de groupe imposés afin de préserver sa propre intimité. A l’inverse, le compagnon de Nadine* lui imposait de toujours tout faire ensemble. Il refusait qu’elle voit ses ami.e.s sans lui, qu’elle fasse de simples courses ou tout autre activité. Nadine devait toujours dire où elle était et si elle arrivait en retard du retour de son travail, elle devait se justifier. Il cherchait à contrôler tout ce qu’elle faisait. Elle, elle souhaitait lui faire plaisir, avait peur de le perdre. Elle a réussi après plusieurs séances à prendre ses décisions seule. Poser des limites fermes, même si cela peut entraîner des conflits, est essentiel pour reprendre le contrôle.  

  • Couper les ponts peut être nécessaire, y compris avec un parent si la relation est toxique. Cela demande du courage. Néanmoins, si une relation demeure dysfonctionnelle et douloureuse, il est préférable de la rompre définitivement. J’accompagne mes clientes tout au long de cette démarche difficile. Le plus éprouvant étant souvent de se libérer du poids de la culpabilité.  

  • Trouver un soutien professionnel : Accompagnement thérapeutique et coaching sont des alliés puissants dans ce processus. Le travail que j’effectue avec mes clientes consiste à les soutenir émotionnellement, à leur offrir des outils concrets pour reconstruire leur estime et leur confiance. 

3.  Se Remettre et Retrouver Confiance en Soi

Une étude menée par University of California, Berkeley en 2016 a démontré que les individus qui vivent dans des relations émotionnellement abusives présentent des niveaux plus élevés de stress chronique, de dépression et d’anxiété. De plus, ces relations peuvent contribuer à l’apparition de troubles de l’estime de soi, de dépendance émotionnelle, et d’isolement social

Il a également été prouvé que l’exposition à des relations toxiques peut avoir un impact direct sur la santé physique. Une étude publiée dans Psychosomatic Medicine en 2014 a révélé que les personnes vivant dans des environnements émotionnellement abusifs ont un système immunitaire affaibli et sont plus sujettes à des problèmes de santé tels que des maladies cardiaques, de l’hypertension artérielle et des troubles digestifs.  

Après la rupture, le travail de guérison peut commencer. Reconstruire son estime de soi après avoir vécu dans une relation toxique nécessite de la patience. Le chemin de guérison peut être long et chaotique. Il est normal de passer par des phases d’euphorie puis de tristesse ou de colère. Les prises de conscience succèdent aux « rechutes ». Le doute s’invite, la culpabilité aussi . Puis un jour, la confiance en soi et l’estime de soi sont suffisamment solides pour fixer des limites saines, sortir de ces schémas dysfonctionnels et donner la priorité à nos émotions, nos ressentis, notre santé mentale. 

  • Revoir les schémas personnels : Le coaching permet comprendre les raisons qui ont conduit à cette relation toxique. Mes clientes prennent conscience qu’elles ont des schémas répétitifs, parfois acquis dans l’enfance, et qu’elles peuvent désormais les briser, s’en libérer. 
  • Se reconnecter à ses passions et intérêts : Nombre de mes clientes ont redécouvert des passions oubliées, comme la peinture ou la danse, pour retrouver leur identité propre et renforcer leur confiance en elles. Ont pu libérer du temps pour leurs propres aspirations, recouvrer leur propre identité. • Pratiquer la pleine conscience et le self-care : Intégrer des moments de pleine conscience, de relaxation ou de soin du corps dans la routine quotidienne est essentiel. Cela permet de calmer l’esprit et de redonner du pouvoir à la personne. 
  • Pratiquer des affirmations positives et la gratitude : Au fil du temps, en adoptant des pratiques de gratitude et de renforcement positif, mes clientes réussissent à attirer une énergie plus saine et plus équilibrée dans leur vie. 

 « Se libérer d’une relation toxique est une étape importante, mais aussi un acte profondément courageux » 

Conclusion : Reprendre le Contrôle de Sa Vie et de Ses Relations

Se libérer d’une relation toxique est une étape importante, mais aussi un acte profondément courageux. En tant que thérapeute,  j’ai accompagné de nombreuses femmes dans ce cheminement, et j’ai vu à quel point chaque étape de guérison est unique et personnelle. Que vous soyez au début de votre prise de conscience ou bien déjà en train de poser des limites, sachez qu’il est tout à fait possible de retrouver un équilibre durable. L’une des clés de ce processus réside dans l’accompagnement et le soutien. Mon rôle est de vous guider à travers chaque étape, d’abord en vous aidant à identifier et à comprendre la dynamique toxique, puis en vous fournissant des outils concrets pour vous libérer et reconstruire votre estime de vous-même. Il s’agit de reprendre le contrôle de votre vie émotionnelle, de redécouvrir vos passions et de recréer un environnement où vous êtes respectée, écoutée et épanouie. 

Je sais que reconstruire votre confiance en vous prend du temps. C’est pourquoi je vous encourage à ne pas vous précipiter, à avancer à votre rythme, et à célébrer chaque petite victoire sur le chemin de la guérison. La thérapie peut être un catalyseur puissant, vous permettant d’apporter des changements profonds et durables. Grâce à un soutien personnalisé, vous pourrez surmonter les cicatrices du passé, mais aussi nouer des relations plus saines et plus équilibrées à l’avenir. Si vous traversez une période de doute ou si vous avez besoin d’aide pour sortir d’une relation toxique, je vous invite à envisager un accompagnement professionnel. Ensemble, nous pourrons travailler à transformer cette expérience difficile en un point de départ vers une version plus forte et plus sereine de vous-même.  Chaque décision prise en faveur de votre bien-être, votre équilibre, votre santé mentale, vous rapproche d’une vie plus alignée avec vos valeurs et vos aspirations, éloignée de toute forme d’aliénation. Il est possible de s’en sortir.  

* Dans un souci de confidentialité et de respect de la vie privée, les prénoms des clientes mentionnées dans cet article ont été modifiés. 

Photo : Sandra Fourqui @sandrafourqui

Makeup & hair : Aziza @azizamakeupartist @typology @zaomakeup_official 

Remerciement à l’hôtel Nolinski Paris 16 avenue de l’Opéra 75001 Paris 

@nolinskiparis @evokcollection  


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